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27/11/2025

L'année de la confusion

Au moins cinq événements ont provoqué cette année une confusion politique, économique et sociale : le second mandat du président Trump, l'effritement de la mondialisation, l'impuissance de l'Europe, l'avancée rapide de l'intelligence artificielle et la montée en puissance géopolitique de la Chine. Ces cinq-là sont mon choix. Il y en a d'autres et bien sûr il y a la crise climatique, mais elle crée de la confusion depuis longtemps. Le dictionnaire définit la confusion comme : « s'emmêler, ne pas trouver une issue ». C'est fortement formulé, mais c'est ce que je veux dire. Le monde calme et stable que nous avons connu durant les deux décennies qui ont suivi la seconde guerre mondiale, a disparu depuis longtemps. Bien que la stabilité fût déjà un concept très relatif à l'époque.

Trump souverain.

Donald Trump est un type de président différent. Trump est soi-disant républicain, mais en réalité, il ne l'est pas. Il ne défend pas l'économie de marché libre parce qu'il veut décider lui-même des taux d'intérêt et tient à orienter le commerce international. Il réduit les impôts pour les plus aisés mais ne semble pas se soucier du déficit budgétaire. Il n'est pas démocrate non plus, bien qu'il suive une politique qui conviendrait parfaitement aux démocrates : rouvrir les usines dans la Rust Belt et créer des emplois pour les classes moyennes. Les démocrates ont grossièrement négligé cet aspect. Ils l’ont payé très cher électoralement. Contrairement à ses prédécesseurs récents, Trump n'est ni républicain ni démocrate, il ressemble à un souverain européen du 19e siècle. Un souverain décide de manière autonome des droits d'importation et utilise ces droits pour punir ou récompenser des pays. Les considérations économiques jouent à peine un rôle dans cette affaire. Une taxe est imposée à un pays parce que le souverain en a décidé ainsi. Les célèbres checks and balances qui ont caractérisé le système politique américain sont contournés. Mais ils ne sont certainement pas encore complètement éliminés. Les prochaines décisions de la Cour Suprême fédérale seront cruciales à cet égard. La mesure dans laquelle la Réserve Fédérale reste indépendante sera également un baromètre pour le genre de présidence que souhaite Donald Trump. Un mot enfin sur les alliances internationales et le multilatéralisme. Nous avons grandi dans un monde où les blocs étaient clairs : unipolaire, bipolaire ou multipolaire. Cela changeait parfois, mais en général il était clair qui appartenait à quel bloc. Aujourd'hui, les amis sont presque devenus des ennemis et les ennemis sont traités comme des amis. Il est difficile pour les organisations internationales et pour les coopérations multilatérales de rester pertinentes.

L'effritement de la mondialisation.

La conséquence immédiate est que la mondialisation de l'économie mondiale s'effrite. C’est déjà arrivé. La mondialisation fluctue sur le long terme. Elle a atteint son apogée au début du 20e siècle et s'est effondrée pendant la première guerre mondiale. Tout a recommencé dans les années soixante. L'effritement de la mondialisation a des conséquences négatives pour la croissance de l'économie mondiale. Mais aussi pour l'inégalité économique entre les pays. Cette inégalité augmentera de nouveau. C'est souvent un sujet de discussion social. Néanmoins, de nombreuses études montrent que la mondialisation a rendu le monde moins inégal, principalement grâce à la croissance spectaculaire de la Chine et des économies asiatiques. Ce qui adviendra de l'inégalité ne sera pas une préoccupation majeure pour Trump. Mais cet effritement menace la position mondiale du dollar et le financement de la dette publique américaine. Les pays BRICS ne représentent pas encore une menace concrète pour l’instant, mais ces nations, et certainement la Chine, rêvent d'une monnaie mondiale concurrente et d'un propre système de paiement.

L'impuissance de l'Union Européenne

L'impuissance de l'Europe est devenue évidente en 2025. Les dirigeants européens étaient à peine impliqués dans les consultations sur l'Ukraine et l'Europe n'a même pas eu droit au chapitre concernant Gaza. Même lors de la conférence climatique, l'Europe a eu du mal. Il y a de nombreuses raisons à cela. L'essentiel est que l'Europe a perdu son pouvoir géopolitique parce qu'elle a perdu son véritable pouvoir économique. La croissance économique en Europe est bien trop faible depuis des années. L'Europe a également négligé et ignoré son industrie. La conséquence de cette négligence, c’est que l'Europe doit râcler les fonds de tiroir pour trouver des moyens de remplir un rôle crédible. L'Europe doit jouer un rôle en Ukraine, mais elle ne peut pas trouver ni libérer les moyens d'imposer sa volonté. Si l'Europe veut trouver une place entre les États-Unis et la Chine, elle devra changer : plus combattive dans la prise de décision et moins préoccupée par des formalités de technocrates. L'Europe doit à nouveau inspirer. N'écrivez pas à quel point l'Europe est bonne, mais faites-le.

L'avancée rapide de l'intelligence artificielle

L'Europe tente de rattraper son retard dans le domaine de l'IA. Ne désespérez pas, l'Europe a certainement des atouts maîtres. Mais en Europe, on accorde plus d'attention aux dangers de l'IA qu'à ses opportunités. Il y a un an, Mario Draghi a incité l'Europe à changer de cap et à se concentrer sur la compétitivité. Draghi a récemment noté que peu de choses de son plan avaient été mises en œuvre. Cela dit, il ne faut pas se laisser subjuguer par le battage médiatique de l'IA. The Economist a récemment montré que les cours des actions américaines d'IA sont probablement exagérés et qu’ils pourraient entraîner une crise financière. Pensez à la fameuse crise Dotcom. Une crise financière peut entraîner une récession économique. Ce n'est pas bon pour les entreprises européennes qui souffrent déjà de la lente croissance et de la faible compétitivité européenne. Comme l'a dit Draghi, l'Europe doit se concentrer sur l'innovation technologique. Ceci est souvent interprété comme étant une transformation digitale. C'est une interprétation trop étroite. Il existe plusieurs domaines où l'Europe est forte et où les autres grands concurrents, comme les États-Unis ou la Chine, sont moins dominants. Je pense à quelques spécialisations en chimie. L'Europe peut également jouer un rôle important dans la technologie du traitement médical.

Le rôle de la Chine

Il fut un temps où la Chine était traitée avec un regard compatissant : une économie qui copie nos innovations. Il y a quarante ans, on disait la même chose du Japon. Les États-Unis et l'Europe étaient les pays innovants. Le Japon puis la Chine ont copié. Depuis lors, les temps ont changé. Nous ne devons pas commettre la même erreur aujourd'hui. Économiquement, l'Europe souffre beaucoup de la Chine. La Chine a développé une grande capacité de production très moderne. L'infrastructure chinoise est souvent excellente. Maintenant que le marché américain est moins accessible à cause des droits d'importation, les entreprises chinoises envahissent le marché européen. Par exemple, notre industrie chimique et notre industrie automobile ont subi de fortes pressions. C'est une compétition de prix mais aussi une compétition de produits. Leurs produits conviennent mieux à certains segments de marché que les nôtres. Les petites voitures électriques le prouvent. L'Europe ne doit pas commettre d'erreur stratégique et exclure la Chine. La Chine devient une puissance technologique, elle compte plus d'ingénieurs que n'importe quel autre pays, peut-être à l'exception de l'Inde. Une grande partie de la recherche scientifique aux États-Unis a été et est réalisée par des doctorants asiatiques. Cela signifie qu'une partie du pouvoir innovant des États-Unis provient des immigrés asiatiques et des Chinois. L'Europe ne peut pas gagner cette bataille technologique sans des partenariats avec la Chine.

C'est clair ! L'économie mondiale a subi plusieurs chocs. J'en ai mentionné cinq, mais il y en a d'autres. Les chocs nous embrouillent. Nous ne savons pas vraiment comment gérer tout ça. On se retrouve piégés. C'est pourquoi nous devons tout faire pour encourager le leadership à tous les niveaux. 

Baron (Herman) Daems,

23 novembre 2025