Il y a quelques jours se terminait le Carême, cette période durant laquelle les chrétiens étaient invités à approfondir leur foi avant que les cloches de Pâques n’en sonnent le glas à leur retour de Rome.
Les membres de notre association défendent un ensemble de valeurs morales transmises par l’éducation en plus de respecter, à leur guise, les dix commandements tels qu’ils furent énoncés dans la Bible. Ces quarante jours d’efforts consentis par tradition méritent un court instant de réflexion.
Le terme Carême dérive de la contraction du mot "quarantième", d’où son surnom "Sainte Quarantaine". Sa pratique fut instituée au IVe siècle et fut fixée dans son actuel calendrier contemporain au VIIe siècle. Sa durée commémore les quarante jours et nuits du jeûne de Moïse avant la remise des Tables de la Loi, comme les quarante jours de tentation du Christ dans le désert après son baptême. Pendant ces 5,71428 semaines, les fidèles sont encouragés à jeûner, à se priver de certains plaisirs (Tik-Tok, Macarons, Scoubidou, lecture de L’Éventail, etc.) et à se concentrer sur la prière.
La recette d’un bon Carême, ou Paastonaika en langue finno-ougrienne de la branche fennique de la famille des langues ouraliennes, contient les ingrédients suivants :
Jeûne et abstinence : En souvenir du jour de la crucifixion du Christ, les croyants jeûnent en faisant une croix sur la consommation de viande les vendredis. Il ne s’agit nullement d’une grève de la faim mais plutôt d’adopter une sobriété en optant, par exemple, pour une portion de riz de Camargue Bio de chez Cru.
Initialement, le jeûne d’Ancien Régime consistait en un seul repas unique quotidien par journée de 24h, purifié par une abstinence totale d’alimentation nutritive comestible le Vendredi saint et le Samedi saint précédant le dimanche de Pâques qui suit, mais pas que ! Dans le rite latin, « tribus dominicis ante quadragesimam - Septuagesima, Sexagesima et Quinquagesima - fuerunt etiam pars praeparationis paschalis », bien que les exigences de jeûne aient été progressivement assouplies, permettant un repas de midi (dé-jeûner) dès le XIIIe siècle, complété par une collation de l’évêque le soir (dé-collation). Cette version est plus connue sous les appellations de Carême allégé ou Carême 0% du Christ.
Depuis 1983, le vieux jeûne, tel qu’il était observé jusqu’alors, n’est plus prescrit par l’Église. L’application de cette nouvelle Loi de la Table nous incitant à ne pas nous taper la cloche jusqu’à Pâques est conforme à celle détaillée dans le Livre de la Jeûnèse : "Je ne mangeai pas de nourriture agréable ; ni viande ni vin ne passèrent par ma bouche […] jusqu’au terme de ces trois semaines." (Da 10,3). Par ailleurs, cette diète est un temps de pénitence durant lequel l’esprit n’est pas à la fête. On n’y chante donc ni alléluia ni gloria, au risque d’être rappelé à l’ordre par le vigile Pascal, de même qu’on évite tant que possible de s’y marier.
Aumône : En 2013, dans son explication du sens de l’aumône, le pape François a dit « se méfier de l’aumône qui ne coûte rien et qui ne fait pas mal », rappelant par la même occasion que l’amour du Christ, ce n’est pas donner « comme le ferait celui qui donne en aumône de son superflu avec un piétisme philanthropique ». Après avoir bu ces paroles, il ne reste plus qu’à en digérer le poids des mots.
Prière et méditation : Les pratiquants sont encouragés à intensifier leur vie de prière en se concentrant sur la repentance et la relation avec Dieu. Comme Zachée, il nous faut, le mercredi, descendre de notre arbre d’Estal afin de prendre de la hauteur, méditer, prier. Sachez seulement que cet évangile de saint Luc n’a aucun lien avec le Carême puisque la conversion de Zachée eut lieu autour d’un repas.
Dans son message pour le carême de 2024, le pape François nous dit qu’il « est temps d’agir, et que durant le Carême, agir c’est aussi s’arrêter. S’arrêter en prière, pour accueillir la Parole de Dieu, et s’arrêter comme le Samaritain, en présence du frère blessé ».
S’arrêter, c’est aussi se structurer, se renforcer et se charpenter de ces petits os rigides et pointus servant de squelette aux ostéichthyens ichtyophages. Par cette métaphore, le Saint-Père a certainement voulu nous rappeler que, si l’habit ne fait pas le moine, revêtir l’écaille permet d’accepter aisément de se reconnaître pêcheur.
N’en déplaise aux carnistes, la période de carême correspond en effet à celle durant laquelle on s’adonne à la consommation du poisson d’avril au détriment de la viande en mets.
Nous remercions le comte Pierre-Alexandre de Lannoy pour la rédaction de cet article.